L’OSR présentait ce soir, 3 décembre 2010, en
troisième concert de la série d’abonnement Répertoire,
deux œuvres d’Antonin Dvorak, Dans la
nature, poème symphonique op. 91, et la fameuse Symphonie N°9, en mi mineur, op. 95, dite « du Nouveau Monde », qui entouraient
le Concerto pour alto et orchestre de
William Walton, confié à l’archet d’Antoine Tamestit.
Dvorak avait composé trois poèmes symphoniques
qu’il souhaitait voir joués en cycle, commençant par l’ouverture de concert Dans la nature, op. 91, se poursuivant avec
Carnaval, op. 92, et Otello, op. 93, dotés tous trois à
l’origine d’un seul numéro d’opus. Compositeur à succès, notamment consacré en
Angleterre, sa production du début des années 1890 montre une nouvelle liberté
de ton et une confiance retrouvée en lui-même, qui produiront, outre ces trois
poèmes symphoniques, la huitième symphonie ou le Requiem, œuvres majeures du répertoire. Dvorak exprime ainsi dans
les opus 91 à 93 sa foi dans la création comme véritable source du bien et du
mal dans la vie. Si Dans la nature
évoque le bien-être physique et moral que l’on y trouve, les joies humaines
prennent le dessus dans Carnaval,
avant que la jalousie ne mette un terme au cycle sur une note malsaine, revers
de la médaille joyeuse de l’insouciance. Jouée seule en ouverture de concert, Dans la nature offrait une excellente entrée en matière sous la
baguette de Marek Janowski. Ce petit quart d’heure introductif permettait à
l’orchestre de faire valoir des qualités de timbres qui rendent bien l’écriture
de Dvorak. Il y a quelque chose de très brahmsien dans cette pièce, une
certaine contemplation de la nature également, qui se termine dans une profonde
douceur. Janowski ne rééditait cependant pas là le miracle des interprétations
de Brahms entendues en ouverture de la saison passée. Il y avait comme une
certaine nonchalance ici à expédier cette pièce non comme une œuvre à part
entière, mais comme une simple ouverture de concert, avant de passer à autre
chose.
Cette autre chose fut en première partie de
concert le Concerto pour alto de
William Walton. Compositeur anglais qui fut une sorte d’enfant prodigue
dérangeant de la scène anglaise du début du XXème siècle, qui connut
un réel succès avec la création de son concerto en octobre 1929, joué lors des Proms au Queen’s Hall de Londres, sous la direction de Sir Henry Wood. Le
dédicataire de l’œuvre, Lionel Tertis, l’ayant trouvée injouable, c’est le
compositeur allemand Paul Hindemith, également l’un des meilleurs altistes de
son temps, qui en assura la création triomphale. Trouvant son inspiration,
comme le Concerto pour violon de
Britten, dans le premier Concerto pour
violon de Prokofiev, cette œuvre s’articule en trois mouvements, Andante comodo, Vivo e molto preciso, Allegro
moderato. Remanié trente ans après sa création, la nouvelle version,
entendue ce soir, attira les éloges de Britten, qui lui trouvait un style
détendu et frais. L’orchestre et le soliste dialoguent parfaitement, même si
l’alto superlatif d’Antoine Tamestit s’alloue l’essentiel des bénéfices de la
soirée. L’OSR en effet offre un accompagnement digne certes, mais dénué d’une
inventivité qui pourrait réellement répondre aux traits du soliste.
C’est sur un tube que se terminait la soirée,
l’œuvre attendue, celle qui justifiait sans doute la présence ce soir là de la
majorité des spectateurs, la célébrissime Symphonie
du Nouveau Monde de Dvorak. Après les qualités des interprétations d’œuvres
symphoniques de Brahms entendues l’an passé, nous pensions pouvoir tenir là une
interprétation majeure de cette œuvre rabâchée. Nous en sortîmes déçus car le
succès facile avait été au rendez-vous sans que le chef n’aie à aller
sérieusement le chercher. Le premier mouvement, Adagio – Allegro molto était abordé sur des tempi très rapides qui
ne permettaient pas aux timbres de l’orchestre de briller réellement et
offraient l’impression d’une certaine confusion. Le Largo, un poco piu mosso paraissait un peu forcé, notamment aux
pupitres des flûtes et des bois. Les deux mouvements finals, le Scherzo : Molto vivace – Poco sostenuto
et Allegro con fuoco étaient
également pris à un train d’enfer, s’enchaînant sans laisser à l’auditeur le
temps de respirer. Comme souvent, les cuivres étaient trop forts, ce qui
enlevaient beaucoup de son charme à une œuvre que l’on ne rendait ainsi
qu’éclatante. Le public apprécie ce genre de facilité mais l’amateur reste
sceptique, regrettant qu’on ne lui offrît pas mieux dans une œuvre certes des
plus rabattues du répertoire symphonique, mais qui n’en demeure pas moins l’une
des plus belles et des plus intéressantes. Dvorak écrivait : « Je suis tout aussi bien un poète qu’un
musicien », nous avons perdu le premier ce soir. Reste à écouter le Nouveau Monde
selon Longfellow : « Ye who
love a nation’s legends, Love the ballads of a people, Listen to this Indian
Legend, to this Song of Hiawatha ! ».
5 décembre 2010
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