Alors que le
bicentenaire verdien touchait son apogée dans la représentation de Don Carlo, comment ne pas programmer
également cette Missa da requiem d’un
compositeur qui sortait de son terrain scénique de prédilection pour apporter à
l’art du requiem une œuvre emblématique. Si la présence au programme du
Festival de Salzbourg des opéras de Verdi a souvent suscité des tensions, celle
du Requiem y est bien plus régulière. C’est en dirigeant cette œuvre que
Karajan réalisait son premier enregistrement depuis Salzbourg, le 14 août 1949,
avec à l’affiche le même orchestre des Wiener Philarmoniker et pour chanteurs
Hilde Zadek, Margarete Klose, Helge Rosvaenge et Boris Christoff. Comme il
fallait faire dans l’exceptionnel en ces temps de jubilé, l’on rassemblait pour
trois concerts, du 15 au 18 août 2013, la baguette de Riccardo Muti, le soprano
de Krassimira Stoyanova, le mezzo d’Elina Garanca, le ténor Piotr Beczala et la
basse Dmitry Belosselskiy.

Muti connaît son Requiem depuis longtemps, comme tous ses
Verdi d’ailleurs, et ce n’est pas la première fois qu’il vient le donner à
Salzbourg, où il dirige cette année également Nabucco. Sur la scène du Grosses
Festspielhaus en ce matin du 18 août 2013, la veille d’y découvrir la
fameuse production de Don Carlo, il y
avait tout d’une grande représentation. Le port altier d’un chef immense, qui
montre un certain orgueil à présenter une chevelure de jais à un âge où le
blanc se masque encore par coquetterie mais garde le geste sûr, au sommet de
son art, certain d’un succès qu’il sait sans doute acquis mais qu’il va
chercher néanmoins dans une interprétation sans concession. Dans une œuvre où
il est facile de faire de l’effet, la lecture de Muti ne laisse rien au hasard
et mesure chaque note, chaque son. Dans une entente parfaite avec l’Orchestre
qui sent le long travail en commun, il ombre le repos éternel des âmes qu’un Dies Irae violent ne viendra durablement
troubler. Sans jamais tomber dans l’excès de théâtralité, Muti met en avant les
jeux de clair-obscur dont est pleine la partition.
Affichant un
quatuor de solistes au meilleur des distributions qu’il est possible de
rassembler aujourd’hui, ce requiem était en plus parfaitement chanté et les
chœurs étaient magnifiquement préparés. Elina Garanca, au timbre plein de
couleurs était particulièrement touchante dans les premières mesures du Lacrimosa. Le Libera me de Krassimira Stoyanova ne devrait laisser aucune âme
contrainte et quel Offertorium !
Ensemble, les deux femmes faisaient courir des frissons dans le Rex tremendae. La voix de stentor de
Dmitry Belosselskiy donnait des profondeurs sépulcrales au Tuba mirum et au Confutatis.
Ténor très en vue, Piotr Beczala offrait un timbre magnifique mais forçait
parfois un peu sa voix, cherchant l’opéra là où Muti ne le voulait pas. Quel
protecteur invoquerai-je, quand le juste sera lui-même dans l’inquiétude, sinon
ces cordes de l’orchestre ouvrant à la lumière éternelle (Lux aeterna).
19 août 2013.
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